samedi 12 septembre 2009

Soirée au festival

Ils ont installé des chapiteaux blancs, ils vendent de la bière dans des gobelets, des artistes ont rassemblés leurs fiertés sur toile, des poteries, des colliers, et autres objets oiseux. Le soir est frais et impose vestes ou manteaux. La scène projette des basses et des spectres multicolores sur les édifices de brique. C’est un petit festival, ils en sont à la deuxième édition, une tribune pour les génies de sous-sol de la région.

On y rencontre de vieilles connaissances que l’ont regrette d’avoir apostrophé dès la fin de la poignée de main. On aurait voulu dire salut au revoir, ils nous demandent pis keusse tu fais d’bon et on répond tout ce qu’il y a de plus emmerdant, pour s’assurer de faire ça court, boulot-maison-cours-ces trucs là, tu sais comment c’est. On demande et toi?, mais vraiment on s’en balance, on écoute à peine.

Les musiciens se défoncent comme ils le peuvent devant une foule qui ne bronche pas, je ne sais pas ce qu’ils font là, devant la scène, à dévisager les artistes comme si c’étaient des extra-terrestres. J’ai envie de leur mettre le feu au cul. On prend une gorgée de bière, on fume une cigarette quêtée à celui qui fume les moins cheap – la première du mois, la dernière, aussi. On se passe des commentaires sur la l’efficacité du batteur, sur l’usage remarquable que la chanteuse fait de ses cordes vocales. Un ami cherche les bécosses, s’inquiète de l’attente, il dit bon je n’ai pas le choix, quand il faut il faut. Trois mecs se détachent du groupe, ils s’enfoncent dans la foule, ils en ont roulé un petit, veulent aller en fumer un gros, hors d’atteinte des deux policiers en fin de shift qui patrouillent nonchalamment. Le spectacle tire à sa fin, on s’est un peu dispersé, on se retrouve, on se questionne sur le prochain band. C’est un type seul, un DJ, il commence bientôt, ne jouera que pendant vingt minutes, sur l’autre scène.

Une autre bière avant que ça commence, dans le même gobelet c’est moins cher, ils sont éco-conscientisés, ils éco-conscientisent, on passe la remarque que c’est une idée sagace, que ça devrait toujours être comme ça. Le DJ démarre sa machine à sons et derrière son Mac, son instrument, il tourbillonne comme un possédé, en synchro avec son apocalypse de musique breakcore. On se dit ce mec là c’est un malade, on adore ça, les malades.

Ensuite il y a un groupe de métal, on aurait dit les fils de White Snake; frissons de dégoût. Ils ont un cracheur de feu, on se demande ça impressionne qui, on se l’imagine échapper sa vodka partout dans sa face et brûler comme un pantin en criant comme un forcené, ça nous fait marrer. Certains s’impatientent devant l’extrême mauvais goût de ces bibittes à poil pleines de sueur. Les pieds endoloris, les oreilles meurtries, on fout le camp.

En marchant vers la voiture stationnée à dix minutes de marche, un type nous interpelle, il cherche son chemin, c’est un des gars du premier band, il dit ouais ça groove, hein. On répond ouais, ça groove. Il n'a rien compris des directions, mais son égo est flatté.

Et ça se termine comme ça, on rentre tous chez nous, plus ou moins ivres, on s’endort tant bien que mal, les oreilles encore pleines, les talons un peu enflés, l’âme qui ne cherche qu’à se transvider dans l’océan du sommeil. Les paupières s’affaissent, comme deux pierres tombales.

3 commentaires:

  1. Eh wow ! Je viens de faire ta découverte.
    Génial ! T'as un nouveau suiveux, ou suceux, tels que tu veux bien nous appeler. ;)

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  2. Ça fait longtemps que j'ai pas vécu une soirée comme cela...!? Je suis pas certaine que le tout me manque, mais écouter un bon band live ça ça me manque en c...

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  3. L'achigan: Enchanté, monsieur, soyez le bienvenu dans le marais à sangsues. :)

    Jane: Il faut se les permettre, ces soirées! Allons!

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